En prélude à la dissolution des partis politiques, le gouvernement prit en Conseil des ministres, la décision d’abroger la charte les concernant, pour ne pas s’embarrasser de procédure. L’abrogation de la charte des partis politiques, sans en voter une, et la dissolution des partis ont été adoptées, validées par le Conseil national de la Transition. C’est bon et propre, procédurier; «ces militaires au pouvoir sont plus politiques que les politiques», a-t-on dit.
Ce n’est qu’au moment où la justice est arrivée, tombée comme un cheveux dans la soupe, chamboulant tout avec cette demande aux présidents des partis politiques de justifier les fonds utilisés dans le cadre du financement public des partis politiques, qu’il y a eu hiatus. On y voit une absence notoire de coordination entre gouvernement, Justice et CNT dont la concertation dans ce dossier aurait pu permettre d’éviter cette cacophonie.
La demande de pièces justificatives des montants perçus et consommés par les partis politiques, même adressée aux présidents vivants des partis politiques morts, n’aurait-elle pas dû intervenir avant leur dissolution? Et ne serait-il pas plus approprié d’impliquer le Bureau du Vérificateur Général plutôt que la section des comptes de la cour suprême qui a déjà joué son rôle en son temps?
A moins que le gouvernement ne veuille amener la cour suprême à se dédire et à se faire hara kiri. S’agirait-il pour la cour suprême de rassembler les pièces justificatives pour les transmettre aux vérificateurs ? Ne les a -t-elle pas déjà, puisqu’aucun parti ne peut bénéficier de nouveau financement sans justifier au centime près celui de l’année précédente ? Or c’est sur plusieurs années que les partis politiques ont bénéficié de l’argent public.
Les partis politiques sont tenus de déposer au plus tard le 31 mars de chaque année, leurs comptes annuels de l’exercice précédent auprès de la Section des comptes de la Cour suprême. Cette juridiction établit au plus tard le 31 décembre de l’année en cours, un rapport annuel de vérification des comptes de l’exercice précédent qui est rendu public. La vérification peut s’étendre à toutes les structures du parti, indique la Charte. La production de faux bilans par tout parti politique entraîne la perte du droit au financement public pour l’année suivante, sans préjudice de poursuites judiciaires.
Ou alors veut-on pointer du doigt une complicité tacite entre les partis politiques et la section des comptes de la cour suprême?
Selon l’Article 21 de la Charte des partis au Mali , « Les ressources financières des partis politiques sont constituées d’une part de ressources propres et d’autre part de dons, legs, libéralités et subventions ». L’article 23 de cette même Charte dispose que « Les partis ne peuvent recevoir des dons et legs provenant des sociétés commerciales, industrielles et de services ».
Le montant cumulé des dons, legs et libéralités ne doit en aucun cas dépasser 50 % du montant total des ressources propres du parti politique et doit faire l’objet d’une déclaration adressée, à la clôture de l’exercice budgétaire, au ministre chargé de l’Administration territoriale, selon l’article 24. « Tout parti politique doit tenir une comptabilité régulière et un inventaire de ses biens meubles et immeubles conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur. Les documents et pièces comptables doivent être conservés pendant dix ans au moins… », selon la Charte. 85 partis politiques remplissaient les conditions pour être éligibles à l’exercice 2019. Le montant cumulé de financement des partis politiques de 2001 à 2019 est de 28 933 848 944 FCFA.
B. Daou