Maintenant, plus que jamais, le peuple malien est face à son destin. Les présentes sanctions de la CEDEAO (cf. article en page …) sont dirigées contre le Mali, en cela qu’elles frappent le peuple malien, l’Etat malien dans son existence et ne visent pas que les autorités de la transition, civiles et militaires. Le prolongement de la transition donnera un mauvais exemple dans la sous-région, il faut sanctionner la gouvernance militaire de la transition, c’est le principe de la CEDEAO. Mais n’est-il pas temps que l’organisation régionale évolue, ainsi que ses principes ? La fraude électorale, comme le coup d’Etat, a des conséquences dévastatrices sur la démocratie et la bonne gouvernance, pour ne pas dire que la fraude électorale est démocraticide. S’il n’ya pas de malice derrière, la CEDEAO doit être aussi regardante sur les fraudes électorales qui imposent des élus- des gouvernants- non représentatifs des électeurs, que sur le putsch auquel ces élections frauduleuses conduisent. La CEDEAO peut-elle offrir une garantie d’élections crédibles dans un court délai au Mali? C’est la loi de l’omerta quand les présidents Alassane Dramane Ouattara de la Côte d’Ivoire et Alpha Condé de la Guinée Conakry révisent la constitution pour se maintenir au pouvoir, ou quand le RPM et partis alliés au Mali tripatouillent, usent de la fraude électorale pour garder la majorité parlementaire et le perchoir, rompant le cou à la démocratie et à la bonne gouvernance, au vu et au su de tout le monde.
Tous les Maliens n’ont pas la mémoire si courte, au point d’oublier que la Transition actuelle découle d’une crise de gouvernance à l’issue d’élections manifestement frauduleuse ayant conduit à des contestations tous azimuts, une situation de disfonctionnement institutionnel et de décrépitude de l’Etat malien : dissolution de l’Assemblée nationale, remembrement de la Cour constitutionnelle, mise en place d’un mini gouvernement de six membres, des contestations d’élections sur plusieurs semaines se muant en contestations du pouvoir qui les a organisées, le tout se parachevant par un putsch étrangement pacifique, dont les images du déroulement ont été montrées par la télévision nationale du Mali (ORTM) où on voit le président tranquillement sortir de chez lui en compagnie des militaires, destination Kati où il va signer sa démission de la présidence de la République.
Une transition s’explique par l’échec du régime précédent. Si nous avons aujourd’hui au Mali, un président militaire de la Transition, Col. Assimi Goïta, un Premier ministre civil, Choguel Kokalla Maïga et un gouvernement mixte (civils et militaires), c’est parce que d’autres ont lamentablement failli. Ces gouvernants élus, en réalité mal élus à l’issue d’élections frauduleuses mal tranchées devant les juridictions dédiées (au point que la cour constitutionnelle va être remembrée), ont conduit le Mali dans le mur, l’insécurité croissante, le terrorisme rampant. Ainsi, élections après élections, la mauvaise organisation de celles-ci a permis de se repartir les sièges du Parlement. Et des postes de nomination suivant le même scenario népotiste et corrompu.
Ces pratiques de la fraude électorale, qui nous renvoient des élus majoritairement mal élus à l’Assemblée nationale, qui ne sont capables d’aucun contrôle parlementaire de l’action gouvernementale ; ces nominations népotistes et partisanes pour des intérêts personnels aux antipodes de l’intérêt général sont-elles favorables à la démocratie, à l’épanouissement de l’Etat de droit, ou nourrissent-elles l’insécurité, le terrorisme ?
On se souvient de l’état de décrépitude avancée de la gouvernance au Mali et de l’Etat malien au moment de la prise du pouvoir par les militaires. Un peuple fort est celui qui évite d’avoir la mémoire trop courte, et qui reste digne et soudé devant les épreuves de l’ensemble national. Et surtout éviter de se prévaloir de ses propres turpitudes, mais plutôt tirer les enseignements des échecs et de les transformer en opportunité, formule dont se prévalent les peuples progressistes.
L’éviction du pouvoir du président Ibrahim Boubacar Kéita le 18 août 2020, alors que la gouvernance rampait déjà par terre, devrait marquer un tournant décisif si tous les responsables politiques acceptaient de se mettre au chevet d’un Etat malien failli. Mais comme à leur habitude, soucieux plutôt de leur propre chapelle et le Mali peut couler, les acteurs politiques ne se sont pas retrouvés, comme ils ne se sont pas retrouvés au second tour de l’élection présidentielle d’août 2018 contre le président IBK, candidat pour un second mandat. On aurait peut être évité une énième souffrance à nos populations, à travers un changement par les urnes. Mais incapables de trouver le minimum commun pour s’assembler, les acteurs politiques maliens y sont allés en rangs transfuges, lorsqu’il s’est agit du dialogue national inclusif (DNI) en décembre 2019.
Notre pays, le Mali existe encore, grâce à un peuple, qui reste à cheval sur les principes et les valeurs, malgré la culture des antivaleurs développée par certains acteurs politiques qui prétendent au leadership politique et qui sèment et récoltent les graines des antivaleurs comme la corruption, le népotisme, l’enrichissement illicite, des malversations financières de toutes sortes. Tout ce système n’a de vie que d’alimentation par la fraude électorale d’où il tire sa source…
B. Daou
Le Républicain
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